Avant
de commencer à écrire la vie admirable de la
divine
Mère de Dieu, il est nécessaire de faire connaître
le rang sublime qu'elle eut de toute éternité dans
l'entendement divin.
Quoique l'intelligence divine une, indivisible et
très simple,
conçoive dans un acte infiniment simple, n'y ayant
pour elle ni
temps passé, ni futur; néanmoins selon notre
manière de comprendre nous distinguons comme
différents
moments.
I. Dieu dans les profondeurs de l'éternité
connaît ses attributs, ses perfections avec une
inclination
infinie à se communiquer au dehors, comme
souverain bien infini.
II. Il décrète de faire cette communication
de
lui-même au dehors par la participation et la
manifestation de
ses grandeurs.
III. Il détermine l'ordre, la manière et la
disposition de cette communication, décrétant que
le
Verbe divin se rendrait visible dans la sainte
humanité.
IV. Il décréta les dons et les grâces qu'il
devait donner à l'humanité divinisée du Christ,
chef de toutes les créatures. Alors réglant
l'économie parfaite de l'Incarnation, il y comprit
la Vierge
Mère avant tout autre décret concernant la
création des autres créatures. Dieu encore
détermina de. créer un lieu où le Verbe
incarné put habiter avec sa divine Mère ; et
premièrement pour eux seuls .il décréta de
créer le ciel et la terre, avec les astres, les
éléments et tout ce qu'ils contiennent, et
secondairement
pour les hommes qui devaient être les vassaux de
ce grand roi et
de cette grande reine.
V. Il décréta la création de la
nature angélique pour être en présence de la
Majesté divine pour l'honorer et l'aimer: elle
devait servir
aussi le Verbe Éternel fait homme et sa très
sainte
mère leur reine.
A ce moment appartient la création du ciel
empyrée, pour
que la gloire de Dieu s'y dévoile et que les bons
y soient
récompensés, ainsi que la prédestination des bons
anges et la réprobation des mauvais; la création
de la
terre pour les autres créatures et de l'enfer dans
son centre
pour le châtiment des esprits rebelles.
VI. Il décréta de créer un peuple et
une société d'hommes semblables au Christ et ses
frères. Dieu ordonna les faveurs et les grâces
qu'il
devait donner à ce peuple par les mérites du
Christ, et
la justice originelle de l'homme s'il y voulait
persévérer. Il prévit la prévarication et
la chute d'Adam, et en lui celle de tous ses
descendants, à
l'exception de la divine mère, qui ne fut pas
comprise dans ce
décret postérieur. Il décréta que ce
malheur serait réparé et que l'humanité du Christ
serait passible.
La
chute des anges
Pour
l'exécution de ces décrets dans le temps, Dieu
créa le ciel et la terre, et la lumière non
seulement
matérielle, mais aussi intellectuelle,
c'est-à-dire les
anges et à la division de la lumière des
ténèbres arriva la séparation des bons et des
mauvais esprits.
Les anges demeurèrent quelque temps dans l'état
d'épreuve qu'on peut diviser en trois
instants: au premier
ils furent créés et ornés des dons de la nature et
de la grâce; au second, la volonté de leur
créateur
leur fut proposée, pour la suivre, et obtenir la
fin pour
laquelle ils avaient été créés. Il leur
donna de très vives lumières sur le bien et le
mal, les
récompenses et les châtiments éternels. Les uns
furent obéissants les autres rebelles; les bons
furent
confirmés en grâce et récompensés de la
gloire éternelle ; les obstinés furent
châtiés et précipités dans l'enfer pour y
être éternellement tourmentés. Le motif de cette
rébellion et de cette disgrâce fut que les anges
ayant eu
une très claire connaissance de l'être divin avec
l'unité d'essence et la trinité des personnes, ils
reçurent commandement d'adorer Dieu comme leur
créateur.
Ils obéirent tous à ce précepte, mais avec quelque
distinction.
Lucifer se soumit parce qu'il crut
impossible de faire le
contraire; mais il ne le fit pas avec une parfaite
charité, et
bien que cette lâcheté à opérer ces premiers
actes ne le privât point de la grâce, sa mauvaise
disposition vint de là, car ses vertus et son
esprit en furent
affaiblis. Dieu leur manifesta qu'il devait
créer une
nature humaine, et que la seconde personne de la
très sainte
Trinité devait s'incarner et élever la nature
humaine
à l'union hypostatique; ils reçurent le
commandement
d'adorer cet homme-Dieu et de le reconnaître
pour chef de toutes
les créatures.
Lucifer
résista
à cet ordre et provoqua ses adhérents à faire de
même,
il leur persuada
qu'il serait leur chef et qu'il constituerait un
royaume
indépendant du Christ. Mais sa méchanceté s'accrut
lorsqu'il lui fut proposé de reconnaître comme
reine et
souveraine, une vierge, mère du Christ, qui devait
être
enrichie des dons de grâce et de gloire, de
manière
à surpasser toutes les autres créatures angéliques
et humaines.
Il résista par d'horribles blasphèmes et
condamna ces décrets divins comme injustes et
injurieux à
sa grandeur. Cette superbe présomption
irrita si fort le
Seigneur, qu'il annonça au serpent dans le paradis
terrestre
qu'Elle (Marie) lui écraserait la tête, ipsa
conteret
caput tuum.
Après
avoir précipité du ciel les anges rebelles et
Lucifer
leur chef, Dieu créa les autres créatures
sur le
modèle du. Christ et de la vierge mère comme leurs
divins
exemplaires ; mais surtout il forma Adam et Eve en
tout semblables
à ces divins originaux. Il leur donna le mouvement
et une
entière-perfection, enfin il les bénit en
considération de leur parfaite ressemblance avec
leurs
modèles.
Le Seigneur cacha à Lucifer la création d'Adam
et d'Eve pendant une partie du temps qu'ils
vécurent ensemble. Dieu agit ainsi pour jeter le
démon
dans le doute, si Eve était celle qui devait lui
écraser
la tête, et Adam le Verbe incarné. La rage de cet
implacable ennemi commença à dresser des embûches
;. ayant réussi à perdre la femme et par son moyen
l'homme, il en triompha orgueilleusement avec ses
démons. Mais
sa satisfaction ne fut pas de longue durée, parce
qu'il vit
combien Dieu s'était montré miséricordieux
à l'égard des criminels et qu'il leur rendrait sa
grâce et son amitié par le moyen de la pénitence;
et ce lui fut un nouveau tourment d'ouïr la menace
qu'une femme
lui écraserait la tête.
Le
genre humain se multiplia par la bénédiction
divine,.
et le Seigneur se choisit un peuple élu, et dans ce
peuple une
lignée illustre et sainte, de laquelle il devait
descendre selon
la chair. Il fit des faveurs signalées à ce peuple,
et
lui révéla des mystères profonds: il suscita de
saints patriarches et prophètes, qui devaient lui
montrer en
figure le Verbe incarné et lui annoncer de loin sa
venue si
désirée. Enfin le temps marqué approchant , Dieu
envoya au monde deux flambeaux très éclatants, qui
annonçaient la prochaine aurore du soleil de justice
Jésus, notre Sauveur.
Saint Joachim et
sainte
Anne
Ces deux flambeaux
furent saint
Joachim et sainte Anne, que
la volonté divine avait préparés et
créés afin qu'il fussent les parents de la vierge
mère de Dieu. Joachim avait sa maison avec ses
parents et amis
à Nazareth, petite ville de Galilée. C'était un
homme juste et saint, éclairé d'une lumière
spéciale qui lui faisait connaître les mystères
des
saintes écritures et le sens des prophéties.
Sainte Anne
avait sa maison à Bethléem; elle était chaste,
humble et belle; elle avait aussi de grandes
illustrations sur les sens
profonds des divines prophéties. L'archange
Gabriel fut
envoyé en forme corporelle à sainte Anne, pour lui
ordonner de prendre Joachim pour époux. Il alla
peu après
vers Joachim et l'avertit en songe de prendre
sainte Anne pour
épouse. Le saint mariage s'accomplit sans que l'un
découvrit à l'autre son secret.
Les deux saints époux habitèrent à Nazareth,
et suivirent les voies du Seigneur, donnant la
plénitude des
vertus à toutes leurs oeuvres. Ils faisaient tous
les ans trois
portions de leur revenu; ils offraient la première
au temple ,
ils distribuaient la seconde aux pauvres , et
destinaient l'autre pour
l'honnête entretien de la famille. Les saints
époux
passèrent vingt ans sans avoir aucun enfant, ce
qui était
réputé comme une honte; c'est pourquoi ils
essuyèrent de leurs voisins plusieurs opprobres,
parce qu'on
croyait que ceux qui n'avaient pas d'enfants
n'auraient aucune part au
futur Messie. Ils étaient même injuriés par les
prêtres comme des êtres inutiles et Joachim étant
allé au temple pour prier, un prêtre appelé
Issachar, le renvoya parce qu'il offrait étant
stérile,
et dès lors indigne d'offrir des sacrifices.
Le saint homme se retira tout affligé; il s'en
alla à une
maison de campagne, priant le Seigneur avec larmes
de lui donner un
enfant, et il fit voeu de le lui consacrer dans
son temple.
L'ange du Seigneur apparut à sainte Anne, et lui
déclara,
qu'il serait agréable à la divine Majesté qu'elle
demandât une postérité. La sainte fit ce qui, lui
était dit et promit à Dieu de lui consacrer le
fruit
qu'il daignerait lui accorder. Les demandes de
saint Joachim et de
sainte Anne arrivèrent en présence du trône de la
divine Majesté.
L'archange Gabriel fut envoyé à saint Joachim:
le Très-Haut, lui dit-il, a exaucé tes prières ,
et Anne ton épouse concevra et enfantera une
fille qui sera
bénie entre toutes les femmes, et que les
nations
reconnaîtront pour bienheureuse; le
Seigneur veut que
dès son enfance, elle lui soit consacrée dans le
temple.
En même temps sainte Anne était élevée dans
une contemplation très-sublime, et toute absorbée
dans le
mystère de l'incarnation, elle priait avec ferveur
le Seigneur
de la rendre digne de voir et de servir' cette
femme si heureuse et si
favorisée qui devait être la mère du Messie
attendu.
Ce fut alors que le saint archange Gabriel se
présenta à
elle, lui annonçant que Dieu la choisissait pour
être la
mère de la très sainte mère de son divin fils.
Toute remplie d'une surprise et d'une joie
inexprimable, elle alla au
temple remercier le Seigneur et lui rendre de
dignes actions de
grâces.
Elle rencontra saint Joachim et lui manifesta les
promesses de
l'archange, sur quoi ils allèrent tous deux au
temple renouveler
leurs voeux et rendre de vives actions de grâces à
l'auteur de ces merveilles. Ils s'en retournèrent
à la
maison, s'entretenant entr'eux des faveurs
signalées qu'ils
avaient reçues du Très-Haut, et ils se
communiquèrent à cette occasion la première Visite
de l'ange ainsi que l'ordre qu'ils avaient reçu de
se marier
ensemble et dont ils n'avaient jamais parlé. La
prudente sainte
Anne ne découvrit point à son époux que l'enfant
promise dût être la mère du Messie, car l'archange
le lui avait défendu.
La plénitude des temps
étant
arrivée, les trois personnes
divines, suivant notre
faible manière de concevoir, dirent entre-elles: «
Il est
temps que nous commencions l'ouvrage de notre bon
plaisir, et que nous
créions cette pure créature qui nous est chère sur
toutes les autres : il faut qu'elle soit
exempte de la loi ordinaire
de la génération de tous les mortels,
afin que la semence du serpent infernal n'ait
aucune part en elle. Il
est juste que la divinité choisisse pour s'en
revêtir une
matière très-pure et qui n'ait jamais été
souillée parle péché; notre équité
et notre providence demandent ce qui est le plus
décent, le plus
parfait, et le plus saint; et cela s'exécutera
parce qu'il n'est
rien qui puisse résister à notre volonté.
Le verbe qui doit se faire homme et servir de
maître aux hommes,
leur enseignera avec plus d'efficacité à honorer
leurs
parents, en donnant le premier l'exemple,
d'honorer celle qu'il n
choisie pour sa mère; entre les honneurs qu'il lui
rendra, le
premier sera la grâce de ne jamais être assujettie
à
ses ennemis.
Puisqu'il doit être le rédempteur du genre humain,
il est
convenable qu'il exerce d'abord cet office à
l'égard de
sa propre mère: elle doit avoir une rédemption
particulière et pour cela être préservée par
avance du péché; ainsi elle sera toute pure et
immaculée, et le fils de Dieu se réjouira en
voyant entre
sa mère terrestre et son père céleste la
ressemblance la plus parfaite qui soit possible
entre Dieu et la
créature.»
Tel fut le décret que les personnes divines
manifestèrent
aux anges bienheureux. Avec une profonde humilité
prosternés devant le trône divin, ils louèrent
Dieu
et lui rendirent de très-vives actions de grâces,
d'avoir
enfin exaucé la prière qu'ils faisaient depuis la
grande
bataille avec Lucifer pour l'accomplissement du
mystère de
l'incarnation qui leur avait été
révélé. Chacun d'eux désirait avec une
sainte émulation d'être employé pour former la
cour
du fils de Dieu et de sa très-pure et sainte mère.
Marie
Vingt ans s'étaient
déjà écoulés depuis le mariage de saint
Joachim avec sainte Anne: Joachim avait donc
soixante ans et sainte
Anne en avait quarante-quatre. Suivant la
promesse divine, ils
engendrèrent cet enfant qui devait être la mère de
Dieu d'une manière vraiment merveilleuse.
Tout s'y passa selon l'ordre commun des autres
conceptions,
néanmoins la vertu du Très-Haut ôta à
celle-ci ce qu'il y avait d'imparfait et de
désordonné,
ne lui laissant que le pur nécessaire, selon les
lois de la
nature, afin que le corps le plus excellent qui
fut et qui sera jamais
entre les pures créatures fut formé sans la
moindre
imperfection.
La vertu divine se découvre surtout dans
l'opération
miraculeuse qui enleva à sainte Anne sa
stérilité
naturelle.
Mais cette opération fut surtout merveilleuse en
ce que la
grâce éloigna entièrement des saints Parents
toute
sorte de sensualité et que l'aiguillon du péché
originel n'y eut aucun part: ainsi donc, ce qui
servit à cette
très pure conception n'étant accompagné d'aucune
imperfection, le péché ne s'y trouva point et
n'y eut
aucun pouvoir.
La sagesse et le pouvoir du Très-Haut prirent un
soin tout
particulier de la formation du corps très-pur de
Marie,
il fut composé selon le poids et la
plus parfaite mesure, tant en la quantité qu'en la
qualité des humeurs naturelles afin que par la
juste proportion
de ce mélange incomparable, il aidât sans
empêchement les opérations d'une âme aussi sainte
que celle qui devait l'animer. Ce
petit corps reçut un tempérament si accompli et
des
facultés si riches que la nature n' aurait
jamais formé,
à elle seule, rien de semblable. Suivant notre
manière de
concevoir, Dieu mit plus de soin à le composer
et à le
former qu'il n'en mit à former tous les cieux et
tout ce que
renferme l'univers.
CHAPITRE
II
La
conception du corps très-pur de Marie se fit en un
jour de
dimanche, correspondant à celui de la création
des
anges dont elle devait être la reine et la
souveraine.
Et bien que selon l'ordre commun, les autres corps
aient besoin de
plusieurs jours pour être entièrement organisés,
afin que l'âme raisonnable y soit infuse, néanmoins
dans
cette occasion le temps nécessaire fut
considérablement
abrégé, et ce qui se devait opérer naturellement
en quatre-vingts jours, se fit avec plus de
perfection en sept. Le
samedi suivant, le plus proche de cette
conception, le Très-Haut
créa l'âme auguste qu'il Unit à son corps.
C'est ainsi qu'entra
dans le monde la créature la plus
pure, la plus parfaite, la plus sainte et la
plus belle que Dieu ait
jamais créée et qu'il doit créer jusqu'à la
fin des temps.
C'est à cause de ce
mystère que le saint esprit a ordonné que
l'église
consacrerait le samedi à la très-sainte Vierge,
comme le
jour auquel elle avait reçu
le plus grand bienfait, lorsque son âme
très-sainte fut
créée et unie à son corps, sans que le
péché originel ni le moindre de ses effets s'y
trouvassent.
Le jour de sa conception que l'église célèbre
aujourd'hui, n'est pas celui de la conception du
corps, mais celui de
l'infusion de l'âme sans aucune trace du péché
originel. A l'instant de l'infusion de l'âme
la très
sainte trinité répéta ces paroles
proférées à la création de l'homme,
faciamus hominem ad imaginem et similitudinem
nostram: par la vertu
de ces divines paroles, l'âme très-heureuse de
Marie fut
remplie de grâces, de dons, de privilèges et de
faveurs
pardessus les premiers des Séraphins, avec l'usage
le plus
parfait de la raison qui devait être proportionnée
aux
dons de la grâce qu'elle recevait.
Alors le Seigneur répéta les paroles prononcées
par lui lors de la création, et erant valdè
bona,
témoignant ainsi la rare complaisance qu'il
prenait dans cet
ouvrage si glorieux. Au temps de l'infusion de
l'âme dans le
corps, le Très-Haut voulut que sainte Anne
ressentit et reconnut
d'une façon très relevée la présence de la
Divinité.
Elle fut remplie du saint Esprit et ravie en
une extase
très sublime, où elle reçut de très hautes
connaissances des mystères les plus cachés. Cette
allégresse et cette joie toute spirituelle ne
furent pas
passagères, mais durèrent tout le reste de sa vie
quoiqu'elles fussent plus fréquentes pendant
qu'elle gardait
dans son sein le trésor du ciel.
Quoiqu'alors la très sainte âme de Marie fut douée
de toutes les perfections et de l'habitude infuse
de toutes les Vertus,
plus qu'aucun saint et même que tous les saints
ensemble, il ne
fut pas néanmoins nécessaire qu'elle les pratiquât
toutes aussitôt, mais seulement celles qui
convenaient à
l'état où elle était.
Elle pratiqua donc en premier lieu les vertus
théologales, la
foi, l'espérance et la charité, et
particulièrement la vertu de charité, contemplant
Dieu
comme le bien souverain avec tant d'attention et
d'amour qu'il n'est
pas au pouvoir de tous les séraphins d'arriver à
un
degré si éminent.
Elle pratiqua aussi les autres vertus qui
ornent et qui
perfectionnent la partie raisonnable.
Elle eut la science infuse, les vertus morales,
les dons et fruits de
l'Esprit Saint en un degré éminent et
correspondant aux
vertus théologales; de
sorte qu'elle fut dès le premier instant de sa
conception plus
sage, plus prudente, plus éclairée sur Dieu e
sur toutes
ses oeuvres que toutes les créatures ensemble
Cette grande perfection de Marie ne consistait
pas seulement dans les
habitudes qui lui furent infuses, mais dans les
acte qu'elle put
exercer dès cet instant par le pouvoir divin qui
la secondait.
Pour en toucher seulement quelque chose, elle
connut Dieu tel qu'il est
en lui-même comme créateur et glorificateur; elle
l'honora, le loua, le remercia; par de actes
héroïques elle
l'aima, le craignit et l'adora, et lui fit des
sacrifices de louanges
et de gloire pour son être immuable.
Elle connut les dons qu'elle avait reçus pour
lesquels elle
rendit de très humbles actions de grâces
accompagnées de profondes inclinations corporelles
qu'elle fit
dès le sein de sa mère avec son petit corps, et
elle
mérita plus en cet état par ces actes que tous les
saints
dans le plus haut degré rie leur perfection et de
leur
sainteté.
Elle eut outre les actes de la foi infuse, une
haute connaissance de la
divinité et de la très-sainte trinité, et
quoiqu'elle ne la vit pas dans cet instant
intuitivement, elle la vit
néanmoins abstractivement, et cette manière de
la
connaître fut la plus parfaite par laquelle Dieu
puisse se
manifester à l'entendement humain dans ce monde.
Elle connut en cet instant la création, la chute
des anges,
celle d'Adam et les effets de sa faute, le
purgatoire, les limbes,
l'enfer et toutes les choses renfermées en ces
lieux; tous les
hommes , tous les anges, leurs ordres, leur
dignité et leurs
opérations et encore toutes les autres créatures
avec,
leurs instincts et leurs qualités.
Elle connut aussi toute sa généalogie et tout le
reste du
peuple saint et choisi de Dieu, les patriarches et
les
prophètes, et combien sa Majesté divine avait
été admirable dans les dons, grâces et faveurs
qu'il leur avait accordés.
Mais c'est
une chose
digne d'admiration que, ce corps étant si petit
dans le premier
instant de sa conception, néanmoins par la
puissance divine la
connaissance et la douleur qu'elle avait de la
chute d'Adam lui faisait
verser des larmes, et elle commençait dès lors
dans le
sein maternel à exercer l'office de
corédemptrice du
genre humain.
Elle offrit ces larmes unies aux désirs des
patriarches; et
cette offrande fut agréable à Dieu et plus
efficace pour
obtenir la rédemption que toutes les prières des
hommes
et des saints anges. Elle pria spécialement pour
ses parents
qu'elle connut en Dieu avant de les voir
corporellement, et elle
exerça en même temps envers eux la vertu de
l'amour, du
respect et de la gratitude de fille.
Les visions de cette sainte enfant furent
continuelles et sans
interruption durant les neuf mois qu'elle
demeura renfermée dans
le sein de sa mère, et trois fois elle fut
élevée
à une très haute contemplation quoique
abstractive de la
très-sainte Trinité.
La première eut lieu le premier instant qu'elle
fut
animée,
la seconde au milieu des neuf mois, et la
troisième le jour qui
précéda sa naissance.
Elle s'occupa dans ces neuf mois à des actes
héroïques d'adoration et d'amour de Dieu, à des
demandes continuelles en faveur du genre humain, à
une sainte
communication avec les anges.
Elle ne ressentit point la clôture de la prison du
sein maternel,
ni les incommodités de cet état naturel, et
l'interdiction de l'usage des sens extérieurs ne
lui causa
aucune peine.
Elle fit à Dieu avec une entière ferveur la
demande de
mourir, avant de venir à la lumière du monde, si
elle
devait manquer en un seul point à son amour et à
son
service.
Ce fut dans la dernière vision abstractive de la
très-sainte Trinité qu'elle eut le jour qui
précéda sa naissance. Cette prière ayant
été faite, le Très-Haut lui donna sa
bénédiction, et lui commanda de sortir du sein
maternel
à la lumière matérielle de ce soleil visible.
Dieu,
pour augmenter davantage la gloire et la vertu de
sainte Anne, voulut
que dans le temps de sa grossesse elle eut à
souffrir diverses
afflictions. Lucifer, découvrant une si grande
sainteté
clans cette femme, eut le soupçon que l'enfant
qu'elle avait
dans son sein pouvait être cette illustre femme
qui devait le
fouler aux pieds et lui briser la tête.
Dans sa rage il mit en oeuvre divers moyens pour
la faire périr.
Il osa la tenter de plusieurs fausses persuasions
et de
défiances sur sa grossesse, pour la faire
chanceler dans sa foi;
mais ce fut en vain. Il tâcha d'abattre la maison
qu'habitait la
Sainte afin que l'ébranlement et la terreur qui en
résulterait fissent périr l'enfant dans son sein.
Mais il ne put réussir, parce que les anges qui
gardaient la
très-sainte enfant lui résistèrent. Il pervertit
et irrita certaines femmelettes qui s'acharnant
avec rage contre notre
sainte, lui firent de sensibles affronts et de
grandes railleries sur
sa grossesse; ces artifices furent encore
inutiles, bien que les
pauvres femmes eussent consenti aux mauvaises
suggestions de Lucifer.
CHAPITRE
III
DE L'HEUREUSE NAISSANCE DE MARIE.
PRÉMICES DE SA VIE TOUTE MERVEILLEUSE
Les
neuf mois étant accomplis, sainte Anne fut
éclairée d'une lumière intérieure, par
laquelle le Seigneur lui fit connaître que le
temps de ses
heureuses couches était venu.
Prosternée en présence de la majesté divine, elle
demanda humblement au Seigneur de l'assister de
ses grâces, et
tout-à-coup elle sentit dans son sein un doux
mouvement, qui lui
fit comprendre que sa très-chère enfant voulait
venir
à la lumière.
Dans cet état de la sainte mère, la
très-sainte enfant vint au monde le huit
septembre, à
minuit; et afin qu'elle ne vit ni ne sentit sa
naissance, elle fut
ravie en une extase très-sublime en paradis.
La sainte mère voulut elle-même l'envelopper de
ses
langes, la recevoir dans ses bras, sans permettre
que d'autres mains la
touchassent et elle put remplir elle même cet
office parcequ'elle
ne ressentit pas les douleurs de l'enfantement.
Sainte Anne ayant reçu cette chère enfant dans ses
bras
adresse à Dieu cette prière:
« Seigneur, dont la sagesse est infinie,
créateur
de tout ce qui a l'être, je vous offre
humblement le fruit de mes
entrailles que j'ai reçu de votre infinie bonté
et je
vous remercie du fond du coeur. Faites de la
fille et de la mère
selon votre très-sainte volonté, et regardez de
votre
trône notre petitesse.
Je félicite les saints pères des limbes et tout le genre
humain, à cause du gage
assuré que vous leur donnez de leur prochaine
rédemption.
Mais comment me comporterai-je envers celle que
vous me donnez pour
fille, ne méritant pas d'être sa servante?
Comment
oserai-je toucher la véritable arche du
testament? Donnez-moi
Seigneur la lumière qui m'est nécessaire pour
connaître votre sainte volonté, pour l'exécuter
suivant votre bon plaisir et dans les services
que je dois rendre
à ma fille.»
Le Seigneur lui fit entendre de traiter cette
sainte enfant en ce qui
concernait l'extérieur, comme une mère traite sa
fille;
mais de lui conserver dans son intérieur le
respect qu'elle lui
devait.
Les
anges vénérèrent leur reine entre les bras de sa
mère et ceux qui étaient préposés à
sa garde se découvrirent à, ses yeux; ce fut la
première fois qu'elle les vit sous une forme
corporelle. Ils
étaient mille, désignés par Dieu pour sa
défense dès le premier instant de sa conception.
Quant ils l'eurent adorée,
Dieu envoya le saint archange Gabriel, afin
qu'il annonçât
cette bonne nouvelle aux saints pères des
limbes; et dans le
même instant il envoya une multitude innombrable
d'anges pour
prendre et transporter dans le ciel en corps et
en âme celle qui
devait être la mère du verbe éternel.
La petite Marie entra dans le ciel par le
ministère des anges,
et prosternée avec amour devant le trône royal du
Très-Haut, elle fut reçue de Dieu lui-même dans
son
trône.
Elle fut mise à son côté en possession du titre
de
sa propre mère et de reine de toutes les
créatures, bien qu'elle ignorât alors la fin de
ces profonds mystères, le Seigneur les lui cachant
pour sa plus
grande gloire.
Il fut déterminé dans le conseil divin de donner
un nom
à cette enfant bien aimée, et aussitôt on entendit
une voix sortant du trône de Dieu, qui disait: n
notre
élue doit s'appeler Marie.
Ce nom doit être merveilleux et magnifique : ceux
qui
l'invoqueront avec une affection dévote, recevront
des
grâces très-abondantes; il sera terrible contre
l'enfer et
écrasera la tête du serpent »
Le Seigneur commanda aux esprits angéliques
d'annoncer cet
heureux nom à sainte Arme, afin que ce qui avait
été arrêté dans le ciel fut manifesté
sur la terre. Les saints anges exécutèrent les
ordres de
Dieu.
Ayant chacun un bouclier lumineux où le nom de
Marie
était gravé, ils annoncèrent à sainte Anne
que c'était le nom qu'elle devait lui imposer.
Marie fut donc remise entre les bras de sa mère,
qui ne
s'aperçut point de cette absence, parce que
pendant assez
longtemps, sainte Anne eut une extase d'une
très-haute
contemplation, et parce qu'un ange occupa la
place de la très
sainte enfant, ayant un corps aérien semblable
au sien.
Il
est bon de connaître le continuel exercice auquel
était
occupée la sainte enfant.
Au commencement de chaque jour, elle se
prosternait
intérieurement en la présence du Très- Haut, et le
louait pour ses perfections infinies; elle lui
rendait des actions de
grâces de l'avoir tirée du néant, et se
reconnaissant l'ouvrage de ses mains, elle le
bénissait,
l'exaltait, l'adorait comme son souverain Seigneur
et créateur
de tout ce qui a l'être.
Elle élevait son esprit pour l'abandonner aux
mains de Dieu;
avec une profonde humilité et une parfaite
résignation,
elle priait Dieu de disposer d'elle selon sa
sainte volonté;
pendant ce jour là et pendant tous ceux qui lui
resteraient
à vivre et de lui enseigner ce qui lui serait le
plus
agréable pour l'accomplir exactement.
Cette sainte habitude qu'elle prit dès sa
naissance, elle la
conserva pendant tout le cours de sa vie, sans
jamais y manquer,
quelques occupations et travaux qu'elle eût: elle
la
répétait même plusieurs fois le jour dans
l'accomplissement de ses innocentes actions.
Les soixante-six jours
de la purification
étant passés, sainte Anne alla au temple portant
dans ses
bras sa très pure enfant : elle se présenta à la
porte du tabernacle avec l'offrande que la loi
exigeait.
Le saint prêtre Siméon ressentit une joie
extraordinaire
et sainte Anne entendit alors une voix qui lui
dit d'accomplir le voeu
qu'elle avait fait d'offrir sa fille au temple
dès l'âge
de trois ans.
En entrant dans ce temple sur les bras de sa mère,
cette aimable
enfant voyant de ses yeux tant de magnificence
consacrée au
culte divin, en éprouva dans son esprit des effets
merveilleux,
et ne pouvant se prosterner à terre pour adorer la
divinité, elle y suppléa du moins en esprit. Elle
pria
humblement le Seigneur de la recevoir en ce lieu,
au temps que sa
sainte volonté avait déterminé.
En témoignage de l'acceptation que le Seigneur en
faisait, une
très claire lumière. descendit du ciel d'une
manière sensible sur la mère et sur l'enfant.
Ayant fini
sa prière et présenté son offrande, sainte Anne
revint à sa maison de Nazareth.
La très sainte enfant était traitée dans la
maison
paternelle comme les autres enfants de son âge.
Elle prenait les mêmes aliments qu'eux, mais en
très
petite quantité, son sommeil était court,
quoiqu'elle se
laissât coucher quand on le voulait; elle n'était
pas
importune et ne pleurait jamais pour les petits
chagrins ordinaires aux
autres enfants, mais elle était très douce et très
paisible et elle dissimulait cette merveille en
versant souvent des
larmes pour les péchés des hommes, afin d'en
obtenir le
pardon, et de hâter la venue du rédempteur.
Son visage était ordinairement joyeux, mais
pourtant
sérieux et plein de majesté et il n'y avait dans
ses
actions jamais rien de puéril.
Elle recevait dans de certaines rencontres les
caresses qu'on lui
faisait, mais à l'égard de celles qui n'étaient
point de sa mère, elle les modérait par son
sérieux:
Aussi le Seigneur inspira à saint Joachim et à
sainte Anne un grand respect et une grande
modestie en sorte qu'ils
étaient fort réservés et fort prudents dans les
démonstrations sensibles qu'ils lui donnaient de
leur tendresse.
Lorsqu'elle était seule, ou qu'on la mettait
dans son
berceau pour dormir, ce qu'elle ne faisait que
fort sobrement, et sans
jamais interrompre les actions intérieures du
saint amour, elle
conférait sur les mystères du Très-Haut avec les
anges.
Elle fut sujette à la faim, à la soif et aux
peines
corporelles parce qu'il était convenable qu'elle
imitât
Jésus. La faim, la soif étaient plus grandes pour
elle
que pour les autres enfants, et la privation de
nourriture lui
était plus dangereuse, à cause de la perfection de
son
tempérament; mais si on ne lui en donnait pas à
temps, ou
qu'on y excédât, elle prenait patience jusqu'à ce
que l'occasion se présentât de la demander par
quelque
signe.
Elle ne ressentait pas de peine d'être enveloppée
dans ses
langes, à cause de la connaissance qu'elle avait
que le verbe
incarné devait être ignominieusement garrotté.
Lorsqu'elle était seule, elle se mettait en forme
de croix,
parce qu'elle savait que le rédempteur du monde
devait mourir
ainsi. Elle rendait très fréquemment des actions
de
grâces pour les aliments qui la nourrissaient,
pour les
influences des planètes, des étoiles, des cieux,
reconnaissant tout cela pour un bienfait de la
bonté divine; si
elle manquait de quelque chose, elle ne se
troublait point, sachant que
tout est une pure grâce et un bienfait du
Seigneur.
Nous
avons dit qu'une de ses principales occupations
était de
s'entretenir avec les Anges, lorsqu'elle
était seule. Pour
mieux faire entendre tout ceci, il faut donner une
idée
précise sur la manière dont ils se rendaient
visibles
à ses yeux, et dire quels étaient ces esprits
angéliques.
Ils avaient été pris des neuf choeurs, cent de
chaque
choeur, et choisis parmi ceux qui s'étaient le
plus
distingués par leur amour pour le Verbe incarné et
sa
très sainte mère, dans le combat contre Lucifer.
Lorsqu'ils lui apparaissaient ils avaient la forme
de jeunes hommes
d'une merveilleuse beauté.
Leur corps participait fort peu du terrestre, et
il était comme
un cristal très pur et rayonnant de la lumière du
ciel.
Ils joignaient à cette beauté une gravité noble,
et un air majestueux.
Leurs vêtements étaient semblables à un or
très pur émaillé et embelli des plus riches
couleurs.
On découvrait néanmoins que tout cela n'était pas
fait pour être touché, mais pour la vue seule,
comme la
lumière du soleil. Ils avaient sur la tête une
belle
couronne des fleurs les plus riches et les plus
variées, qui
exhalaient un parfum céleste. Ils portaient en
leurs mains des
palmes entrelacées, qui signifiaient les vertus
que Marie devait
pratiquer, et la gloire qu'elle devait obtenir.
Ils avaient aussi sur leurs poitrines des devises
qui avaient quelque
rapport à celles des ordres militaires, il y avait
un chiffre
qui voulait dire: Marie Mère de Dieu. Cette devise
était
resplendissante, c'était un de leurs plus beaux
ornements; mais
la sainte vierge ne la comprit que lorsqu'elle
conçut le Verbe
incarné.
Les effets que ces esprits célestes
produisaient dans
l'âme de Marie ne se peuvent expliquer dans le
langage humain.
Outre les neuf cents anges dont nous avons parlé,
soixante-dix
Séraphins d'entre les plus proches du trône,
choisis parmi
ceux qui se distinguèrent le plus par la dévotion
à l'union hypostatique des deux natures divine et
humaine,
assistaient leur jeune reine.
Lorsqu'ils se rendaient visibles, elle les
voyait sous la
même forme qu'Isaïe les vit, ayant six ailes,
deux qui
voilaient leur face, deux qui voilaient leurs
pieds, et ils volaient
avec les deux autres, signifiant ainsi le
mystère caché
de l'Incarnation et l'essor ardent de leur amour
envers Dieu.
Leur manière de communiquer avec la vierge était
la
même qu'ils gardent entr' eux, les supérieurs
illuminant
les inférieurs; car bien que la Reine du ciel leur
fût
supérieure en dignité et en grâce, néanmoins
dans sa nature l'homme comme le dit David, a été
fait
moindre que les anges.
Il y avait encore douze anges dont a fait mention
Saint-Jean (Apoc. ch.
21, v. 12.) Ils étaient de ceux qui se
distinguèrent le
plus par leur amour pour la rédemption des hommes.
Ils furent
choisis afin qu'ils coopérassent avec Marie au
privilège
qu'elle a d'être mère de miséricorde et
médiatrice du salut du monde. Ces douze anges lui
apparaissaient
corporellement comme les premiers, et ils
portaient plusieurs couronnes
et plusieurs palmes réservées pour les dévots de
cette divine reine.
Leur emploi particulier était de lui faire
connaître d'une
manière toute spéciale la charité du Seigneur
envers le genre humain. Les dix-huit anges qui
complétaient le
nombre de mille, étaient de ceux qui se
distinguèrent le
plus par leur affection envers les souffrances du
Verbe incarné.
Ces anges apparaissaient à Marie avec une
admirable
beauté. Ils étaient ornés de plusieurs devises de
la passion et d'autres symboles mystérieux de la
rédemption. Ils avaient une croix sur la poitrine
et une autre
sur le bras; l'une et l'autre d'une singulière
beauté et
d'une splendeur extraordinaire.
La sainte vierge se servait souvent de ces
anges qu'elle
envoyait en ambassade à son très aimable fils
pour le
bien des âmes. Tous ces mille anges
assistèrent
à la garde dé cette grande reine, sans y jamais
manquer
en rien, comme nous le verrons, en plusieurs
occasions, dans la suite
de cette vie, et ils jouissent maintenant dans le
ciel d'une joie toute
particulière, par sa présence et par sa compagnie.
La
sainte enfant n'eut jamais l'impossibilité de
parler
qu'éprouvent les autres enfants; néanmoins
pendant les
dix-huit premiers mois, elle ne voulut point
prononcer une parole;
cachant par ce moyen la science et la capacité
qu'elle
possédait, et évitant l'étonnement qu'on aurait
eu
d'entendre parler un enfant qui ne faisait que
de naître.
Elle se dispensait seulement de cette loi du
silence, lorsque dans la
solitude elle priait le Seigneur, ou parlait avec
les anges de sa
garde.
Le temps étant arrivé où la divine Marie
devait rompre ce saint silence, le Seigneur lui
déclara qu'elle
pouvait commencer à parler avec les créatures
humaines.
Avant d'exécuter cet ordre, elle supplia le
Seigneur dans une
humble et fervente prière de l'assister dans cette
dangereuse et
difficile action de parler, afin qu'elle n'y
commît jamais aucune
faute.
Le Seigneur lui ayant promis sa divine assistance,
elle délia sa
langue pour la première fois et les premières
paroles
qu'elle proféra furent pour demander la
bénédiction de ses parents.
Ceci arriva au dix-huitième mois de sa
naissance. Pendant
les dix-huit autres qui restaient pour achever les
trois ans où
elle entra au temple, elle n'ouvrit presque jamais
la bouche que pour
répondre à sa mère qui s'entretenait avec elle de
Dieu, de ses mystères et surtout de l'incarnation
du Verbe
divin.
Il était admirable de voir le soin qu'elle
mettait dans
un âge si tendre à faire les choses les plus
basses et les
plus humbles, comme de nettoyer et de
balayer la maison, et alors
les saints anges l'aidaient à recueillir ce fruit
d'humilité. La maison de Joachim n'était pas fort
riche,
mais pourtant elle n'était pas des plus pauvres;
c'est
pourquoi sainte Anne habillait sa fille le mieux
possible, dans les limites de
l'honnêteté et de la modestie.
Dès que la
sainte
enfant commença à parler, elle pria ses parents
de la
vêtir plus pauvrement d'un habit grossier et de
couleur de cendres, et leur témoigna le
désir
qu'il eût déjà été porté.
Sainte Anne ne jugea pas à propos de la ‘vêtir
d'habits
aussi grossiers qu'elle le demandait, elle la
satisfit néanmoins
pour la couleur et pour la forme qui rappelaient
un peu l'habit qu'on
met aux enfants par dévotion. Elle ne répliqua pas
une
parole, et se montra très soumise à‘sa mère,
compensant par cet acte d'obéissance l'acte
d'humilité
qu'elle ne pouvait pas faire.
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VIERGE MARIE
révélé à Marie d'Agréda
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