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Jésus face aux responsables politiques de son époque
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"Seigneur, dans les colonies de la Diaspora, il y a des hommes prêts à s'insurger..."
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Voici un extrait
des évangiles de Maria Valtorta (7.156) que je trouve intéressant et que j'aimerais vous faire connaître.
On va proposer à Jésus de prendre la tête d'une révolte et de devenir leur roi.


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"Ton Royaume, le Royaume attendu d'Israël est né. Nos richesses, nos puissances, nos épées, sont à tes pieds. Parle ! Commande ! L'heure est venue." Tous approuvent le discours de Chouza. Jésus, les bras croisés, se tait.


(...) Le char franchit un petit pont et une barrière au-delà de laquelle le verger fait place à un jardin dont l'allée est couverte de gravier. Au bruit différent que font les roues sur le gravier, Jésus ouvre les yeux.

"Nous sommes arrivés, Maître. Voici les hôtes qui nous ont entendu et accourent" dit Chouza.

Et en effet un grand nombre de gens, tous de riche condition, se groupent au commencement de l'allée et ils saluent avec de pompeuses révérences le Maître qui arrive. Je vois et reconnais Manaën, Timon, Éléazar, et il me semble en voir d'autres qui ne me sont pas inconnus mais dont je ne puis dire les noms. Et puis un très grand nombre que je n'ai jamais vus, ou que du moins je n'ai jamais remarqués particulièrement. Il y en a beaucoup avec des épées et d'autres qui n'en ont pas étalent les abondantes fanfreluches des pharisiens, des prêtres ou des rabbins.

Le char s'arrête, et Jésus en descend le premier en s'inclinant pour saluer collectivement. Les disciples Manaën et Timon s'avancent pour échanger un salut particulier. Et puis c'est Eléazar (le bon pharisien du banquet dans la maison d'Ismaël) et avec lui s'amènent deux scribes qui tiennent à se faire reconnaître. Il y a celui qui à Tarichée eut son petit fils guéri, le jour de la première multiplication des pains, et l'autre qui nourrit la foule au pied de la montagne des béatitudes. Et un autre encore se fraie un passage : le pharisien qui dans la maison de Joseph, au temps de la moisson, fut instruit par Jésus sur le vrai motif de son injuste jalousie.

Chouza procède aux présentations et je les passe sous silence, car c'est à en perdre la tête dans la foule des Simon, des Jean, des Lévi, des Eléazar, Nathanaël, Philippe, Joseph etc. etc. les sadducéens, les scribes, les prêtres, des hérodiens en grand nombre, et même je devrais dire que ces derniers sont les plus nombreux, et une poignée de prosélytes et de pharisiens, deux synhédristes et quatre chefs de synagogues et, perdu je ne sais comment dans cette foule, un essénien.

Jésus s'incline à chaque nom, regardant intensément chaque visage et esquissant parfois un léger sourire comme quand quelqu'un, pour préciser son identité, spécifie quelque fait qui l'a mis en rapport avec Jésus.

C'est ainsi qu'un certain Joachim de Bozra Lui dit : "Ma femme Marie a été guérie de la lèpre par Toi. Sois béni."

Et l'essénien : "Je t'ai entendu quand tu as parlé près de Jéricho et un de nos frères a quitté les rives de la Mer Salée pour te suivre. Et j'ai encore entendu parler de Toi à propos du miracle d'Élisée d'Engaddi. [7] Sur ces terres nous vivons purs, en attendant..."

Qu'attendent-ils je ne sais. Je sais qu'en le disant, cet homme regarde avec un air de supériorité un peu exaltée les autres qui ne jouent certainement pas aux mystiques mais qui, pour la plupart, paraissent jouir allègrement du bien-être que leur situation leur permet.

Chouza soustraie son Hôte aux cérémonies des salutations et le conduit dans une salle de bains confortable où il le laisse pour les ablutions d'usage, certainement agréables par cette chaleur, et il revient vers ses hôtes, avec lesquels il parle avec animation, et ils en arrivent presque à une dispute à cause de la diversité des avis.
Certains veulent commencer de suite le discours. Quel discours ? D'autres, au contraire, proposent de ne pas assaillir tout de suite le Maître mais de commencer par le persuader de leur profond respect.
C'est cet avis qui prévaut car il a pour lui le plus grand nombre, et Chouza, en qualité de maître de maison, appelle ses serviteurs pour commander un banquet qu'ils feraient vers le soir pour laisser du temps à Jésus, "qui est visiblement fatigué, de se reposer" ce que tout le monde accepte et quand Jésus revient, les hôtes prennent congé de Lui en s'inclinant profondément, le laissant avec Chouza qui le conduit dans une pièce à l'ombre, où se trouve une couchette basse couverte de riches tapis.

Jésus, resté seul, confie à un serviteur ses sandales et son vêtement pour qu'il les dépoussière et enlève les traces des pérégrinations du jour précédent. Il ne dort pas; assis sur le bord de la couchette, les pieds nus sur la natte qui recouvre le pavé, avec la courte tunique ou sous-vêtement qui Lui arrive aux coudes et aux genoux, il pense intensément. Si l'habillement ainsi réduit le fait paraître plus jeune dans la splendide et parfaite harmonie de son corps viril, l'intensité de sa pensée, qui n'est certainement pas gaie, marque son front de rides et contracte son visage en Lui donnant une expression de douloureuse fatigue qui le vieillit.

Aucun bruit dans la maison, personne dans la campagne où dans la lourde chaleur les grappes mûrissent. Les rideaux sombres qui pendent devant les portes et aux fenêtres n'ont pas la moindre ondulation.

Ainsi passent les heures...
(...)

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... Jésus rejoint les hôtes dans l'atrium qui divise la maison du nord au sud, formant un lieu aéré et agréable, pourvu de sièges et orné de rideaux légers, multicolores, qui modifient la lumière sans gêner l'aération. Maintenant, tirés de côté, ils laissent voir le cadre de verdure qui entoure la maison.

Jésus est imposant. Bien qu'il n'ait pas dormi, il semble avoir pris des forces et sa démarche est celle d'un roi. Le lin du vêtement qu'il vient de mettre est très blanc et les cheveux, rendus lumineux par le bain du matin, brillent avec délicatesse, encadrant le visage de leur couleur dorée.

"Viens, Maître. Nous n'attendions que Toi" dit Chouza, et il le conduit le premier dans la pièce où sont les tables.

On s'assoit après la prière et une ablution supplémentaire pour les mains, et le repas commence, pompeux comme toujours, et silencieux au début. Puis la glace se rompt.

Jésus est voisin de Chouza, et de l'autre côté se trouve Manaën avec comme compagnon Timon. Les autres sont placés par Chouza, avec son savoir faire de courtisan, sur les côtés de la table en forme de U. Seul l'essénien a refusé obstinément de prendre part au banquet et de s'asseoir à la table commune avec les autres. Ce n'est que lorsque un serviteur, sur l'ordre de Chouza, lui offre un petit panier précieux rempli de fruits, qu'il accepte de s'asseoir devant une table basse, après je ne sais combien d'ablutions, et après avoir relevé les larges manches de son vêtement blanc par crainte de les tacher ou pour suivre un rite, je ne sais.

 C'est un banquet bizarre où l'on communique plus par les regards que par les discours. Tout juste de brèves phrases de politesse et l'on s'étudie réciproquement : Jésus étudie les convives et eux l'étudient.

Enfin Chouza fait signe aux serviteurs de se retirer après avoir apporté de grands plateaux de fruits qui sont frais pour avoir peut-être été conservés dans le puits, très beaux, je dirais presque glacés, avec ce givre qui caractérise les fruits conservés dans la glace.

Les serviteurs sortent après avoir aussi allumé les lampes, inutiles pour l'instant car il fait encore clair dans le long crépuscule d'été.

"Maître" commence Chouza "tu dois t'être demandé le pourquoi de cette réunion et du silence que nous observons. Mais ce que nous devons te dire est très grave et ne doit pas être entendu par des oreilles imprudentes. Maintenant nous sommes seuls et nous pouvons parler.

Tu le vois, tous ont pour Toi le plus grand respect. Tu es parmi des hommes qui te vénèrent comme Homme et comme Messie. Ta justice, ta sagesse, les dons dont Dieu t'a donné la maîtrise. nous sont connus et nous les admirons. Tu es pour nous le Messie d'Israël, le Messie selon l'idée spirituelle et selon l'idée politique.

Tu es l'Attendu qui doit mettre fin à la douleur, à l'humiliation de tout un peuple, et non seulement de ce peuple renfermé dans les confins d'Israël, ou plutôt de la Palestine, mais pour le peuple d'Israël tout entier, des milliers et des milliers de colonies de la Diaspora répandues par toute la Terre, et qui font retentir le nom de Jéhovah sous tous les cieux et qui font connaître les promesses et les espérances, qui maintenant se réalisent, d'un Messie restaurateur, d'un Vengeur, d'un Libérateur et créateur de l'indépendance véritable et de la Patrie d'Israël, c'est-à-dire de la Patrie la plus grande qui soit au monde, la Patrie : reine et dominatrice, qui annule tout souvenir du passé et tout signe vivant d'esclavage, l'Hébraïsme qui triomphe sur tout et sur tous, et pour toujours, parce qu'ainsi il a été dit et qu'ainsi la chose s'accomplit.

Seigneur, ici, devant Toi, tu as Israël tout entier dans les représentants des différentes classes de ce peuple éternel, châtié par le Très-Haut mais bien-aimé de Lui qui le proclame "sien".

Tu as le cœur vivant et sain d'Israël avec les membres du Sanhédrin et les prêtres,
tu as la puissance et la sainteté avec les pharisiens et les sadducéens,
tu as la sagesse avec les scribes et les rabbis,
tu as la politique et la valeur avec les hérodiens,
tu as la richesse avec ceux qui sont fortunés, le peuple avec les marchands et les propriétaires,

tu as la Diaspora avec les prosélytes,
tu as jusqu'à ceux qui sont séparés et qui maintenant sont prêts à se réunir, parce qu'ils voient en Toi l'Attendu: les esséniens, les esséniens irréconciliables. Regarde, ô Seigneur, ce premier prodige, ce grand signe de ta mission, de ta vérité.

Toi, sans violence, sans moyens, sans serviteurs, sans soldats, sans épées, tu rassembles tout ton peuple comme une citerne rassemble les eaux de mille sources.
Toi, presque sans paroles, sans, absolument sans ordres, tu nous réunis, nous, peuple divisé par les malheurs, les haines, des idées politiques et religieuses et tu nous réconcilies.

O Prince de la Paix, réjouis-toi d'avoir racheté et restauré avant même d'avoir pris le sceptre et la couronne.

Ton Royaume, le Royaume attendu d'Israël est né. Nos richesses, nos puissances, nos épées, sont à tes pieds. Parle ! Commande ! L'heure est venue."


Tous approuvent le discours de Chouza. Jésus, les bras croisés, se tait.

"Tu ne parles pas ? Tu ne réponds pas, ô Seigneur ? Peut-être la chose t'a étonné... Peut-être tu sens que tu n'es pas préparé et tu doutes surtout qu'Israël soit préparé... Mais il n'en est pas ainsi. Écoute nos voix. Je parle, et avec moi Manaën, pour le palais royal. Il ne mérite plus d'exister. C'est l'opprobre et la pourriture d'Israël. C'est la tyrannie honteuse qui opprime le peuple et s'abaisse servilement pour flatter l'usurpateur. Son heure est venue. Lève-toi, ô Étoile de Jacob, et mets en fuite ce chœur de crimes et de hontes. Ici sont ceux qui, appelés hérodiens, sont les ennemis des profanateurs du nom des Hérodes, sacré pour eux. A vous la parole."

"Maître, je suis âgé et je me rappelle ce qu'était la splendeur d'autrefois. Comme le nom héros donné à une charogne puante, tel est le nom d'Hérode porté par des descendants dégénérés qui avilissent notre peuple. C'est le moment de répéter le geste qu'a fait plusieurs fois Israël quand des monarques indignes régnaient sur les souffrances du peuple. Toi seul es digne de faire ce geste."

Jésus se tait.


"Maître, te semble-t-il que l'on puisse douter ? Nous avons scruté les Écritures: tu es celui-ci, tu dois régner" dit un scribe.
"Tu dois être Roi et Prêtre. Nouveau Néhémie, plus grand que lui, tu dois venir et purifier. [8] L'autel est profané. Que le zèle du Très-Haut te presse" dit un prêtre.
"Beaucoup d'entre nous t'ont combattu. Ceux qui craignent ton règne sage, mais le peuple est avec Toi, et les meilleurs de nous avec le peuple. Nous avons besoin d'un sage."
"Nous avons besoin d'un pur."
"D'un vrai roi."
"D'un saint."

"D'un Rédempteur. Nous sommes, de plus en plus, esclaves de tout et de tous. Défends-nous, Seigneur !"

"Dans le monde, nous sommes piétinés car, malgré notre nombre et notre richesse, nous sommes comme des brebis sans berger. Appelle au rassemblement par le vieux cri : "À tes tentes, ô Israël !" et de tous les points de la Diaspora comme une levée de troupes surgiront tes sujets pour renverser les trônes vacillants des puissants qui ne sont pas aimés de Dieu."

Jésus se tait toujours. Lui seul est assis, calme comme s'il ne s'agissait pas de Lui au milieu de cette quarantaine de forcenés. Je me rappelle à peine un dixième de leurs raisons car ils parlent tous ensemble comme dans la confusion d'un marché. Lui garde son attitude et continue de se taire.

Tous crient : "Dis un mot ! Réponds !"

Jésus se lève lentement, en appuyant ses mains sur le bord de la table. Il se fait un silence profond. Brûlé par le feu de quatre-vingt pupilles, il ouvre les lèvres, et les autres les ouvrent comme pour aspirer sa réponse, et la réponse est brève mais nette : "Non."


"Mais comment ? Mais pourquoi ? Tu nous trahis ? Tu trahis ton peuple ! Il renie sa mission ! Il repousse l'ordre de Dieu !..." C'est un vacarme ! Un tumulte ! Les visages deviennent cramoisis, les yeux s'enflamment, les mains semblent menacer... Plutôt que des fidèles, ils semblent des ennemis. Mais c'est ainsi :  quand une idée politique domine les cœurs, même ceux qui sont doux deviennent des fauves pour ceux qui s'opposent à leurs idées.

Au tumulte succède un étrange silence. Il semble qu'après avoir épuisé leurs forces ils se sentent épuisés, à bout. Ils se regardent en s'interrogeant, désolés... certains fâchés...

Jésus promène son regard tout autour. Il dit : "Je savais que c'était pour cela que vous me vouliez ici. Et je savais l'inutilité de votre démarche. Chouza peut dire que je l'ai dit à Tarichée. Je suis venu pour vous montrer que je ne crains aucune embûche, parce que ce n'est pas mon heure, et je ne la craindrai pas quand l'heure de l'embûche sera venue pour Moi, car c'est pour cela que je suis venu. Et je suis venu pour vous persuader. Vous, non pas tous, mais plusieurs d'entre vous, êtes de bonne foi. Mais je dois corriger l'erreur dans laquelle, de bonne foi, vous êtes tombés. Vous voyez ?

Je ne vous fais pas de reproches. Je n'en fais à personne, pas même à ceux qui, étant mes disciples fidèles, devraient être conduits par la justice et régler leurs propres passions avec justice. Je ne te fais pas de reproches, juste Timon, mais je te dis qu'au fond de ton amour qui veut m'honorer, il y a encore ton moi qui s'agite et rêve d'un temps meilleur, où tu pourras voir frappés ceux qui te frappèrent.

Je ne te fais pas de reproches, Manaën, bien que tu montres que tu as oublié la sagesse et l'exemple tout spirituels que tu avais de Moi, et auparavant du Baptiste, mais je te dis qu'en toi aussi se trouve une racine d'humanité qui renaît après l'incendie de mon amour.

Je ne te fais pas de reproches, Eléazar, homme juste tant pour la vieille femme qu'on t'a laissée, juste toujours, mais pas maintenant.

Et je ne te fais pas de reproches, Chouza, bien que je devrais le faire parce qu'en toi, plus qu'en tous ceux qui de bonne foi veulent me faire roi, est vivant ton moi. Roi, oui, tu veux que je le sois. Il n'y a pas de piège dans ta parole. Tu ne viens pas pour me prendre en faute, pour me dénoncer au Sanhédrin, au roi, à Rome. Mais plus que par amour - tu crois n'agir que par amour, mais cela n'est pas - plus que par amour, tu agis pour te venger des offenses qui te sont venues du palais royal. Je suis ton hôte et je devrais taire la vérité sur tes sentiments, mais je suis la Vérité en toutes choses, et je parle pour ton bien.

Et il en est ainsi de toi, Joachim de Bozra, et de toi, scribe Jean, et de toi aussi, et de toi, et de toi, et de toi." Il montre celui-ci, celui-là, sans rancœur, mais avec tristesse... et il continue : "Je ne vous fais pas de reproches, car je sais que ce n'est pas vous qui voulez cela, spontanément. C'est l'Embûche, c'est l'Adversaire qui travaille et vous... vous êtes, sans le savoir, vous êtes des instruments entre ses mains.

Même l'amour, même de votre amour, ô Timon, ô Manaën, ô Joachim, ô vous qui réellement m'aimez, même de votre vénération, ô vous qui pressentez en Moi le Rabbi parfait, même de cela, lui, le Maudit, se sert pour nuire et me nuire. Mais Moi, je vous dis à vous et à ceux qui n'ont pas vos sentiments, et qui avec des buts qui descendent de plus en plus bas jusqu'à la trahison et au crime voudraient que j'accepte d'être roi, je dis : Non. Mon Royaume n'est pas de ce monde. Venez à Moi, pour que j'établisse mon Royaume en vous, rien d'autre. Et maintenant, laissez-moi aller."

"Non, Seigneur, nous sommes bien décidés. Nous avons déjà mis en mouvement nos richesses, préparé des plans, nous avons décidé de sortir de cette incertitude qui entretient l'inquiétude d'Israël et de laquelle profitent les autres pour lui nuire.

On te dresse des embûches, c'est vrai. Tu as des ennemis au Temple lui-même. Moi, l'un des Anciens, je ne le nie pas, mais pour y mettre fin, voilà ce qu'il faut : ton onction. Et nous sommes tout disposés à te la donner. Ce n'est pas la première fois qu'en Israël quelqu'un est ainsi proclamé roi, pour mettre fin aux malheurs de la nation et aux discordes. Il y a ici quelqu'un qui, au nom de Dieu, peut le faire. Laisse-nous faire" dit un des prêtres.

"Non ! Cela ne vous est pas permis. Vous n'en avez pas l'autorité."


"Le Grand Prêtre est le premier à le vouloir, même s'il ne semble pas. Il ne peut plus tolérer la situation actuelle de la domination romaine et le scandale royal."


"Ne mens pas, prêtre. Sur tes lèvres le blasphème est doublement impur. Peut-être tu ne le sais pas et tu te trompes, mais au Temple, on ne le veut pas."


"Tu prends donc pour un. mensonge notre affirmation ?"

"Oui, sinon pour vous tous, pour beaucoup d'entre vous. Ne mentez pas. Je suis la Lumière et j'éclaire les cœurs..."

"Nous, tu peux nous croire" crient les hérodiens.

"Nous n'aimons pas Hérode Antipas ni aucun autre."

"Non. Vous n'aimez que vous-mêmes, c'est vrai, et vous ne pouvez m'aimer. Je vous servirais de levier pour renverser le trône, pour ouvrir le chemin à un pouvoir plus puissant et pour faire supporter au peuple une oppression plus mauvaise. Une tromperie pour Moi, pour le peuple, et pour vous-mêmes. Quand vous auriez anéanti le roi, Rome vous anéantirait tous."

"Seigneur, dans les colonies de la Diaspora, il y a des hommes prêts à s'insurger... Nous les soutenons de nos ressources" disent les prosélytes.

"Et des miennes, et tout l'appui de l'Auranitide et de la Trachonitide" crie l'homme de Bozra. "Je sais ce que je dis. Nos montagnes peuvent nourrir une armée, et à l'abri des embûches, pour les lancer comme un vol d'aigles à ton service."

"La Pérée aussi."

"La Gaulanitide aussi."

"La vallée de Gahas avec Toi !"

"Et avec Toi les rives de la Mer Salée avec les nomades qui nous croient des dieux, si tu consens à t'unir à nous" crie l'essénien et il continue en un verbiage d'exalté qui se perd dans le bruit.

"Les montagnards de la Judée sont de la race des rois courageux."

"Et ceux de la Haute Galilée sont des héros de la trempe de Déborah. 17> Même les femmes, même les enfants sont des héros !"

"Tu nous crois peu nombreux ? Nous sommes des troupes nombreuses. Le peuple est tout entier avec Toi. Tu es le roi de la race de David, le Messie ! C'est le cri sur les lèvres des sages et des ignorants, parce que c'est le cri des cœurs. Tes miracles... tes paroles... Les signes..." C'est une confusion que je ne réussis pas à suivre.

Jésus, comme un rocher bien ferme enveloppé par un tourbillon, ne bouge pas, ne réagit même pas. Il est impassible. Et la ronde des prières, des supplications, des raisons, continue.

"Tu nous déçois ! Pourquoi veux-tu notre ruine ? Tu veux n'agir que par Toi-même ? Tu ne peux. Matthatias Maccabée ne refusa pas l'aide des Assidéens [9] et Judas libéra Israël avec leur aide... Accepte !!!" De temps à autre, les cris s'unissent sur ce mot.

Jésus ne cède pas.


Un des Anciens, très âgé, parlote avec un prêtre et un scribe plus âgés que lui. Ils viennent en avant. Ils imposent le silence. C'est le vieux scribe qui parle, après avoir appelé aussi à lui Eléazar et les deux scribes Jean : "Seigneur, pourquoi ne veux-tu pas ceindre la couronne d'Israël ?"

"Parce qu'elle ne m'appartient pas. Je ne suis pas fils d'un prince hébreu."

"Seigneur, peut-être tu ne le sais pas. Eux deux et moi-même, nous fûmes appelés un jour parce que trois Sages étaient venus pour demander où était Celui qui était né roi des hébreux.

Comprends-tu ? "Né roi". On nous réunit, nous les princes des prêtres et des scribes du peuple sur l'ordre d'Hérode le Grand pour répondre à la question. Et avec nous, il y avait Hillel le Juste. Notre réponse fut : "à Bethléem de Juda". Toi, nous le savons, c'est là que tu es né et de grands signes accompagnèrent ta naissance. Parmi tes disciples, il y a des témoins. Peux-tu nier que tu as été adoré comme Roi par les trois Sages ?"

"Je ne le nie pas."

"Peux-tu nier que le miracle te précède, t'accompagne et te suit comme signe du Ciel ?"

"Je ne le nie pas."

"Peux-tu nier que tu es le Messie promis?"

"Je ne le nie pas."

"Et alors, au nom du Dieu vivant, pourquoi veux-tu tromper les espérances d'un peuple ?"


"Je viens pour accomplir les espérances de Dieu."


"Lesquelles ?"

"Celles de la Rédemption du monde, de la formation du Royaume de Dieu. Mon Royaume n'est pas de ce monde. [11] Reprenez vos ressources et vos armes. Ouvrez vos yeux et vos esprits pour lire les Écritures et les Prophètes et pour accueillir ma Vérité, et vous aurez le Royaume de Dieu en vous."

"Non. Les Écritures parlent d'un Roi libérateur."

"De l'esclavage de Satan, du péché, de l'erreur, de la chair, du gentilisme, de l'idolâtrie. Oh ! que vous a fait Satan, ô hébreux, peuple sage, pour vous faire tromper sur les vérités prophétiques ? Que vous fait-il, ô hébreux, mes frères, pour vous rendre si aveugles ? Que, que vous fait-il, ô mes disciples, pour que vous aussi vous ne compreniez plus ? 
Le plus grand malheur d'un peuple et d'un croyant c'est de tomber dans une fausse interprétation des signes
, et ici se produit ce malheur. Des intérêts personnels, des préjugés, des exaltations, un amour mal compris de la patrie, tout sert à créer l'abîme... L'abîme de l'erreur dans lequel un peuple périra en méconnaissant son Roi."

"C'est Toi qui te méconnais."

"C'est vous qui vous méconnaissez, et me méconnaissez. Je ne suis pas un roi humain. Et vous... vous, les trois quarts de vous rassemblés ici, vous le savez et vous voulez mon malheur et non mon bien. Vous le faites par rancœur, non par amour. Je vous pardonne. Je dis à ceux qui ont le cœur droit : "Revenez à vous, ne soyez pas les serviteurs inconscients du mal". Laissez-moi aller. Il n'y a pas autre chose à dire."

Un silence plein de stupeur...

Eléazar dit : "Je ne suis pas ton ennemi. Je croyais bien faire, et je ne suis pas le seul... De bons amis pensent comme moi."

"Je le sais. Mais dis-moi, toi, et sois sincère : que dit Gamaliel ?"

"Le rabbi ?... Il dit... Oui, il dit : "Le Très-Haut donnera un signe si lui est son Christ"."

"Il a raison. Et Joseph l'Ancien ?"

"Que tu es le Fils de Dieu et que tu régneras en Dieu."

"Joseph est un juste. Et Lazare de Béthanie ?"

"Il souffre... Il parle peu... Mais il dit... que tu régneras seulement quand nos esprits t'accueilleront."

"Lazare est sage. Quand vos esprits m'accueilleront. Pour le moment, vous, même ceux que je croyais des esprits accueillants, vous n'accueillez pas le Roi et le Royaume, et c'est cela qui fait ma douleur."

"En somme, tu refuses ?" crient-ils en grand nombre.


"Vous l'avez dit."


"Tu nous as fait nous compromettre, tu nous fais du tort, tu..." crient d'autres: hérodiens, scribes, pharisiens, sadducéens, prêtres...

Jésus quitte la table et il va vers ce groupe, les yeux flamboyants. Quel regard ! Eux, involontairement, se taisent, se serrent contre le mur... Jésus va vraiment visage contre visage, et il dit, doucement, mais d'une manière incisive qui tranche comme un coup de sabre : "Il est dit : "Malheur à celui qui frappe en cachette son prochain et accepte des cadeaux pour condamner à mort un innocent". Moi, je vous dis : je vous pardonne, mais votre péché est connu du Fils de l'homme. Si je ne vous pardonnais pas, Moi... Pour bien moins, Jéhovah a réduit en cendres plusieurs israélites."

Mais il est tellement terrible en le disant, que personne n'ose bouger, et Jésus relève le lourd double rideau et sort dans l'atrium sans que personne ose faire un geste.


Ce n'est que lorsque le rideau cesse de remuer, c'est-à-dire après quelques minutes, qu'ils se remettent.

"Il faut le rejoindre... Il faut le retenir..." disent les plus acharnés.

"Il faut se faire pardonner" soupirent les meilleurs, c'est-à-dire Manaën, Timon, des prosélytes, l'homme de Bozra, en somme ceux qui ont le cœur droit.

Ils se pressent hors de la salle. Ils cherchent, ils interrogent les serviteurs : "Le Maître ? Où est-il ?"

Le Maître ? Personne ne l'a vu, pas même ceux qui étaient aux deux portes de l'atrium. Pas de Maître... Avec des torches et des lanternes, ils le cherchent dans l'obscurité du jardin, dans la pièce où il avait reposé. Personne ! Et il n'y a plus son manteau laissé sur le lit, son sac laissé dans l'atrium...

"Il nous a échappé ! C'est un Satan !... Non. Il est Dieu. Il fait ce qu'il veut. Il va nous trahir ! Non. Il nous connaîtra pour ce que nous sommes." Une clameur d'opinions et d'insultes mutuelles. Les bons crient : "Vous nous avez séduits. Traîtres ! Nous devions l'imaginer !" Les mauvais, c'est-à-dire le plus grand nombre, menacent, et après avoir perdu le bouc émissaire contre lequel ils ne peuvent se tourner, les deux partis se tournent contre eux-mêmes...

Et Jésus où est-il ? Moi, je le vois, parce qu'il le veut, très loin, vers le pont à l'embouchure du Jourdain. Il va rapidement comme si le vent le portait, ses cheveux flottent autour de son visage pâle, son vêtement bat comme une voile dans la rapidité de la marche.

Puis, quand il est sûr de se trouver à bonne distance, il s'enfonce dans les joncs et il prend la rive orientale. Dès qu'il a trouvé les premiers récifs de la haute falaise, il y monte sans se soucier du manque de lumière qui rend dangereuse l'escalade de la côte escarpée. Il monte, il monte jusqu'à un rocher qui surplombe le lac et où veille un chêne séculaire. Il s'assoit là, un coude sur le genou, il appuie le menton sur la paume de la main, le regard fixé sur l'immensité qui s'embrume, à peine visible par la blancheur de son vêtement et la pâleur de son visage, il reste immobile...

Mais quelqu'un l'a suivi. C'est Jean. Un Jean à peine vêtu, avec seulement son court vêtement de pêcheur, les cheveux raides de quelqu'un qui a été dans l'eau, haletant et pourtant pâle. Il approche doucement de son Jésus. Il semble une ombre qui glisse sur la falaise raboteuse. Il s'arrête à quelque distance, il surveille Jésus... Il ne bouge pas, il semble faire partie du rocher. Sa tunique de couleur sombre le dissimule encore plus, seul le visage, les jambes et les bras nus se voient à peine dans l'ombre de la nuit.

Mais quand, plutôt qu'il ne le voit, il entend pleurer Jésus, alors il ne résiste plus et il s'approche et puis l'appelle : "Maître !"

Jésus l'entend murmurer et lève la tête; prêt à fuir il relève son vêtement. Mais Jean crie : "Que t'ont-ils fait, Maître, que tu ne reconnais plus Jean ?"
Et Jésus reconnaît son Préféré. Il lui tend les bras et Jean s'y élance et les deux pleurent pour deux douleurs différentes et un unique amour.

Mais ensuite les pleurs se calment et Jésus, le premier, revient à la vision nette des choses. Il se rend compte que Jean est à peine vêtu, avec sa tunique humide, déchaussé, glacé. "Comment donc es-tu ici, dans cet état ! Pourquoi n'es-tu pas avec les autres ?"

"Oh ! ne me gronde pas, Maître. Je ne pouvais rester... Je ne pouvais te laisser aller... J'ai quitté mon vêtement, tout sauf cela, et je me suis jeté à la nage pour revenir à Tarichée et de là par la rive, puis j'ai franchi le pont et puis je t'ai suivi et je suis resté caché dans le fossé près de la maison, prêt à venir à ton aide, au moins pour savoir s'ils t'enlevaient, s'ils te faisaient du mal, et j'ai entendu que l'on se disputait et puis je t'ai vu passer rapidement devant moi. Tu paraissais un ange. Pour te suivre sans te perdre de vue, je suis tombé dans des fossés et des marécages et je suis tout couvert de boue. Je dois avoir taché ton vêtement... 21> Je te regarde depuis que tu es ici... Tu pleurais ?... Que t'ont-ils fait, mon Seigneur ? T'ont-ils insulté ? Frappé ?"

"Non. Ils voulaient me faire roi. Un pauvre roi, Jean ! Et plusieurs voulaient le faire de bonne foi, par un amour vrai, dans une bonne intention... Le plus grand nombre... pour pouvoir me dénoncer et se débarrasser de Moi..."

(...).




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