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L’Affaire Dreyfus
Voici des épisodes peu connus de l'histoire de France. Extrait du livres "L'Affaire" de Jean Denis Bredin (1983)
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"Mais comprendrez-vous jamais, vous autres Français,
qu'un service de renseignement est et doit être fatalement une officine de faux."
(Esterhazy - 1899)

Page 267-267, nous sommes juste après le "j’accuse" de Zola (3 janvier 1898) On a tous entendu parlé de la "Nuit de Cristal" orchestrée par les Nazis en 1938, mais hélas en France, nous avons eu aussi la notre.

IV. - La furie française


Si les intellectuels antidreyfusards, comme surpris par l'acte révolutionnaire de Zola et l'action concertée qu'il entraîna, tardent à répliquer, en revanche, l'agitation antisémite trouve dans la publication de J'accuse l'aliment d'un brutal renouveau.

Une première vague d'incidents éclate dès le lendemain de la « bombe » lancée par Zola. Le 17 janvier à Nantes, 3 000 jeunes gens parcourent les rues en poussant des cris de mort. On casse les devantures des magasins des Juifs, on tente de forcer la porte de la synagogue.

Le même soir à Nancy, les boutiques des Juifs sont envahies, la synagogue est assiégée. A Rennes, près de deux mille personnes, gentilshommes et paysans mêlés, donnent l'assaut aux maisons du professeur juif Victor Basch, et du professeur Andrade qui avait adressé une lettre, rendue publique, au général Mercier.

A Bordeaux, des manifestations violentes éclatent, aux cris « mort aux Juifs, mort à Zola, mort à Dreyfus»; la police évite de justesse le pillage des magasins juifs. Des scènes analogues se produisent à Moulins, à Montpellier, à Angoulême, à Tours,à Poitiers, à Toulouse.

Le 19 on doit fermer, à Nantes, les boutiques juives, et les dragons doivent rétablir l'ordre. Le 21 à Angers, et à Rouen, la cavalerie doit charger pour empêcher les pillages. Le 22 janvier c'est la gendarmerie qui doit, à Châlons, défendre les magasins des Juifs.

A Saint-Malo le mannequin de Dreyfus est brûlé en place publique. A Marseille plusieurs milliers de gens, conduits par quelques jeunes, acclament les officiers au balcon du cercle militaire, brisent les grilles du temple, et poussent des hurlements de mort contre le rabbin, qu'il faut protéger. Au cours de la dernière semaine de janvier, le centre des émeutes se déplace vers l'est.

Toute la Lorraine est touchée. A Épinal, à Nancy, à Bar-le-Duc, on défile dans la rue, on brise des vitrines, aux cris renouvelés de « A bas Zola, à bas les Juifs ».

Les manifestations réunissent 4 000 personnes à Marseille et Bordeaux, 3 000 à Nantes, 2 000 à Rouen. Elles durent six jours à Rouen,
cinq jours à Marseille et Bordeaux, quatre jours à Nantes, Dijon, Châlons. Chaque fois la police doit intervenir pour préserver les synagogues et les maisons de commerce juives.

A Paris l’agitateur antisémite Guérin exerce ses troupes au quartier Latin, sur les boulevards, autour du Palais de Justice, pendant que se déroule le procès Zola. D'immenses pancartes sont promenées dans Paris, portant les mots « Zola à la potence. Mort aux Juifs ». Guérin proclame, dans le Figaro du 19 janvier, que le peuple de Paris a désormais deux otages : Bernard Lazare et Joseph Reinach.

Presque tous les soirs des réunions publiques sont organisées, où les Juifs, Dreyfus, Zola, le "Syndicat" (V. : mot qui désigne à l'époque une sorte d'organisation juive (imaginaire) qui regrouperait tous les Juifs influents, qui serait antifrançaise et qui passerait son temps à comploter en vue de travailler toujours plus à la ruine des Français) sont voués à la mort. Des services religieux sont célébrés au cours desquels l'officiant invite les fidèles à continuer la lutte sacrée contre le peuple déicide.
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Ci-contre, le général Mercier (1833-1921), le principal chef de la conspiration qui condamna et s'acharna sur Dreyfus
."Il tranchait de tout, sec, hautain, d'une infatuation provocante, infaillible et sûr de son étoile." (...) "Jusqu'à son dernier souffle, droit dans ses bottes, il ne cessera jamais de clamer la culpabilité de Dreyfus"



En Algérie française

Mais c'est en Algérie que se répand une véritable crise d'hystérie anti-juive. L'antisémitisme y avait beaucoup grandi depuis quelques années. Le décret Crémieux, du 14 octobre 1871, qui avait naturalisé en bloc tous les Juifs d'Algérie, les attachant à la République, avait été très mal supporté par la plupart des non-Juifs.

Ils y avaient vu une faveur scandaleuse de la République naissante. Plus de 320 000 Français d'origine tenaient ainsi les 50 000 Juifs installés en Algérie pour une communauté à part, vivant de commerce sinon d'usure, méprisée des Arabes, détestée des étrangers non naturalisés, Espagnols, Maltais. Italiens, antipathique à tous, et du coup repliée sur elle-même, incapable de vivre selon le mode commun. Dès le mois de mai 1897 des déchaînements violents partis de Mostaganem avaient éclaté.

Des magasins juifs avaient été pillés, notamment le 20 mai à Oran, des synagogues saccagées. Entre le 18 et le 24 janvier 1898 ce sont des émeutes sanglantes qui éclatent, dans presque toutes les villes d'Algérie. Les magasins des Juifs sont mis à sac, et la police, qui intervient mal ou tardivement, compte de nombreux blessés. Les bagarres qui commencent à Alger le 18 janvier y durent plusieurs jours.

La plupart des bazars juifs sont dévastés. Les boutiquiers chrétiens sont obligés d'arborer des pancartes indicatrices « Maison catholique », "Pas de Juif dans la maison". Tous les jours Zola est brûlé en effigie.

Le maire d'Alger tente de flatter la population pour rétablir l'ordre : "Vous avez été indignés des agissements infâmes de ceux qui essayent d'atteindre cette chose sacrée, l'honneur de l'Armée française... mais ne faites pas dégénérer en désordre l'explosion de ces beaux sentiments."

Et encore "vous avez montré superbement votre furie française; montrez maintenant que vous avez le calme et la force" .


Le 22 janvier au soir, les principaux meneurs, Pradelle, Lebailly, et un jeune homme, Max Régis Milano, agitateur à très fière allure, de famille italienne, haranguent une foule de plus de six mille personnes.

Max Régis, qui a eu de nombreux duels avec des Juifs, propose d' « arroser de sang juif l'arbre de la liberté ». L'avocat Langlois proclame: «Les Juifs ont osé relever la tête. Il faut les écraser.»

Attaqués les 22 et 23, les Juifs se défendent, et défendent leurs boutiques, à coups de bâton et de pierres. Un émeutier est tué, de nombreux policiers blessés. Le gouverneur Lépine, Venu sur place, est lui-même atteint par un projectile, "au milieu des hurlements d'une foule en délire". Aucune boutique juive n'échappe au Pillage.

Le 23 janvier, au retour des obsèques de l'émeutier tué, plusieurs Juifs sont lapidés, l'un d'eux massacré à coups de matraque. Plus de six Cents Personnes sont arrêtées, plus de cent grièvement blessées. Ce n'est que la première vague d'émeutes qui se prolongeront plusieurs années. Il ne passe guère un jour, en 1898, sans qu'une manifestation anti-juive éclate en Algérie.

Le jeune étudiant Max Régis devient peu à peu l'idole une population qui voit en lui le plus courageux des militants anti-juifs. (...)


Voici un autre épisode peu connu de l'affaire Dreyfus

Une femme, prénommée Léonie

Page 116-118, nous sommes juste après la première condamnation de Dreyfus (1895)

(...) Mathieu pouvait donc être le complice de son frère? La menace paraît assez grave pour que le 5 janvier, sur le conseil de Maitre Demange, il écrive au colonel Sandherr, qui enquête sur cette affaire. Il rappelle leur entrevue. Il proteste avec indignation. il propose de désigner deux experts à l'examen de la comptabilité familiale à Mulhouse. La lettre reste sans réponse. A-t-elle servi à éviter - ou retarder - l'arrestation? La famille Dreyfus vit non seulement dans la douleur, mais dans l'anxiété permanente du lendemain.

Que faire? Mathieu frappe à toutes les portes. Il va voir des journalistes, parmi lesquels Judet dont les articles, notamment dans l'Intransigeant, avaient été très hostiles à Dreyfus. Judet consent à l'écouter, paraît ému, lui tend la main. Il sollicite des hommes politiques. M. Siegfried, ancien ministre du Commerce, lui déclare d'emblée : « J'ai cinq minutes à vous donner », mais promet de faire une démarche pour que le prisonnier soit convenablement traité.

M. Scheurer-Kestner, sénateur inamovible, dernier représentant de l’Alsace française au Parlement, vice-président du Sénat, le reçoit cordialement, demande à réfléchir, le fait revenir, mais lui dit qu'il ne peut s'intéresser à son frère. « Les renseignements que j'ai obtenus me font croire à sa culpabilité ».

Un cousin du général Zurlinden, nouveau ministre de la Guerre, M. Zurcher, habite, paraît-il, Mulhouse. Mathieu s'arrange pour le rencontrer, il le supplie d'intervenir auprès du ministre mais le ministre fait savoir à son cousin qu'il existe au ministère de la Guerre « des preuves nombreuses, évidentes » de la culpabilité d'Alfred Dreyfus. Quelles preuves? Le ministre n'en dit rien. Aucune démarche n'aboutit. «Je me débattais dans le vide, écrira Mathieu Dreyfus... Les heures et les jours nous semblaient interminables » .

"Mathieu fut impressionné. Sur tous les points, Léonie avait dit vrai"

La première lueur vint par hasard, et par un curieux chemin. Un matin de janvier 1895, Mathieu Dreyfus est avisé, par un ami commun, que le docteur Gibert, médecin au Havre, croit à l'innocence de Dreyfus. L'excellent docteur Gibert a deux particularités.

Spécialiste des phénomènes de suggestion mentale, il fait des expériences très intéressantes avec une femme, prénommée Léonie, qu'il met en état de somnambulisme.

Surtout il est, de notoriété publique, un vieil ami du président de la République Félix Faure. Le docteur Gibert demande que Mathieu vienne au Havre. Mathieu accourt. Il veut ne négliger aucune voie, même la plus étrange.

Et la mode est a l'hypnotisme, et a toutes ses déviances: magnétisme, spiritisme, voyance. A Paris l'on se bouscule a la porte d'Henriette Covedon, "la voyante de la rue dc Paradis" dont les extases provoquent de furieuses polémiques. Pourquoi ne pas écouter, au Havre, la voyante du docteur Gibert ? Mathieu Dreyfus décrit ainsi sa première rencontre avec Léonie:

Je vis une paysanne, assise sur un canapé, les yeux fermés, paraissant âgée d'une cinquantaine d'années, aux traits réguliers, coiffée du bonnet normand.

Le docteur me dit de m'asseoir en face d'elle. Elle me prit les pouces, les tata en tous sens, les gratta, puis elle me dit lentement, en cherchant les mots, avec des pauses, des silences quelque- fois assez lon s : "Vous êtes son frère, votre femme est avec vous, vous avez deux enfants, une petite fille et un petit garçon, ils ne sont pas avec vous; il souffre beaucoup. » Puis elle abandonna mes mains et se mit a parler comme si elle se trouvait en présence de mon frère. :

"Pourquoi portez-vous des lunettes? Qui vous a donné ces lunettes? — Mais, lui dis-je, mon frère ne porte jamais de lunettes? Il porte toujours un lorgnon. Ne confondez-vous pas lorgnon avec lunettes ? — Non, non, s'écria avec colère Léonie, je sais ce que je dis; je dis lunettes, ce sont des lunettes. Vous irez plus loin, bien plus loin - et elle fit un geste d'horreur — mais vous reviendrez, c'est sur. Je ne sais pas dans combien de temps, nous autres nous ne connaissons pas le temps, mais sur, sur, vous reviendrez ».

Mathieu fut impressionné. Sur tous les points, Léonie avait dit vrai. Sauf au sujet des lunettes d’Alfred, car il n'en portait pas. Mais Lucie Dreyfus, rentrant de l'ile de Ré, lui apprend que le prisonnier, pour ménager son lorgnon qui tombait très souvent, venait précisément de solliciter une paire de lunettes du directeur de la prison. Maintenant Mathieu Dreyfus est très trouble.

Il revient souvent au Havre. Le docteur Gibert le fait venir des qu'il croit "Léonie bien disposée". Parfois elle dit des choses incompréhensibles, invraisemblables. Parfois ce qu'elle dit passionne Mathieu. Elle dit que le vrai coupable est un officier du ministère de la Guerre, dont elle ne trouve pas le nom, mais qui est en relation avec un agent allemand du nom de Greber. Elle dit que la pièce sur laquelle Alfred a été condamné a été prise a l'ambassade d'Allemagne. Elle dit que l'officier coupable est un ami d'Alfred Dreyfus auquel celui-ci aurait refusé un prêt d’argent. (Il s'agit du commandant Esterhazy qui menait une vie d'aventurier et d’escroc et qui était toujours en manque d'argent).

Au début du mois de février, Mathieu Dreyfus l'entend dire: "Qu'est-ce que c'est que ces pièces qu’on montre secrètement aux juges, ne faites pas cela, ce n'est pas bien. Si M. Alfred et M“ Demange les voyaient, ils détruiraient leur effet. » Dreyfus interroge Léonie: "Que voulez-vous dire avec ces pièces?" Et Léonie lui répond: "Des pièces que vous ne connaissez pas, qu'on a montrées aux juges, vous verrez plus tard".

Des pièces qu'on aurait secrètement montrées aux juges ? Est-ce vraiment Léonie qui, la première, a parlé a Mathieu Dreyfus des "pièces secrètes" qui auraient été dissimulées a M° Demange lors du procès de 1894 ?

Mathieu Dreyfus est en tout cas si frappé qu'avec l'accord du docteur Gibert il fait venir Léonie a Paris. Il l’installe d'abord dans un appartement de la rue de l'Arcade, chez sa propre sœur Mme Cahn. Puis il prendra Léonie chez lui. Elle y vivra bientôt. Le docteur Gibert enseigne patiemment a son élève comment mettre Léonie en état d’hypnose. Bientôt Mathieu l'endort plusieurs heures, parfois plusieurs jours. Et il se livre, avec Léonie somnambule, a de multiples expériences qui lui confirment ses étonnantes facultés.

Léonie prend de plus en plus de place dans la vie de la famille Dreyfus. Parfois elle est lucide. Parfois elle cesse de l’être. Mathieu lui demande de suivre "psychiquement" certains officiers. "Souvent, au seul contact un peu prolongé de mes mains, ou de l'une de mes mains, et c'était une habitude chez elle de prendre l'une de mes mains dans les siennes, elle percevait mon état physique, mon état moral (si j’étais bien ou mal disposé), quelquefois mes pensées qui n’avaient pas toujours de rapport avec l’affaire qui me préoccupait... ".

Mathieu se persuade qu'il dispose d’un pouvoir de suggestion... il tente des expériences sur Léonie à longue distance. Il y passe beaucoup de temps. Devait-il n'avoir d’autre solution que le désespoir ?

Le docteur Gibert a été, au Havre, le médecin de Félix Faure. Il est resté son ami. La nouvelle de la déportation d'Alfred Dreyfus a l’ile du Diable l'épouvante. Il sait que le déporté risque d'y mourir. Le 20 février 1895, le docteur Gibert, d'accord avec Mathieu Dreyfus, demande audience a Félix Faure qui le regoit a l'Elysée le 21, a 7 heures du matin, tandis que Mathieu attend son ami a l'hôtel de l'Athénée 1".

Le docteur Gibert revient, bouleversé. Le président de la République lui a dit que Dreyfus n'avait été condamné ni sur le bordereau ni sur les incidents de l'audience.

"Il a été condamné sur des pièces communiquées aux juges dans la salle des délibérations, pièces qu'on ne pouvait montrer ni a l'accusé, ni a son défenseur, pour des raisons d’Etat. »

Vainement le docteur Gibert a tenté d'intéresser le président de la République a la cause de Dreyfus, mais il a, en fin d'entretien, demandé a Félix Faure: "Mon ami Mathieu Dreyfus connait ma démarche auprès de vous. M'autorisez-vous a lui communiquer notre conversation? » "Oui, a répondu le président". Mais il a exigé le silence a l'égard de tous autres.

Singulier destin, c'est une indiscrétion du président de la République qui révélait le 21 février 1895 la famille Dreyfus qu'un dossier secret avait été transmis aux juges, dans la salle des délibérations. Pour Mathieu c'est une terrible nouvelle, mais une nouvelle qui portait un espoir.

Une monstrueuse illégalité avait permis la condamnation de son frère. "Mon frère n'avait donc pas été jugé, écrit Mathieu, il avait été assassiné. » Il était impossible de rendre publique cette extraordinaire confidence du chef de l'Etat, car il la démentirait aussitôt.
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